Les March Violets embrasent Oslo (Hackney) : le post-punk dans toute sa splendeur gothique
- Nicolas Albert
- 30 juin
- 3 min de lecture

Ce samedi-là, étouffé par une chaleur presque surréaliste – moite, lourde, presque ironique pour un concert post-punk – Oslo (la salle de Hackney, pas la capitale norvégienne) s’est transformée en temple sombre et palpitant. Au cœur de cette fournaise, un souffle venu du Leeds des années 1980 est venu rafraîchir nos esprits avec éclat : les March Violets ont prouvé, une fois de plus, que le post-punk n’a jamais perdu sa puissance hypnotique.
La soirée s’ouvrait sur une performance minimaliste : un jeune artiste seul en scène, armé d’une guitare, d’un ordinateur portable et d’une foi palpable. Si son engagement méritait le respect, l’attention du public semblait davantage vouée à la climatisation salvatrice qu’à l’expérience musicale, oscillant entre exercice introspectif et expérimentation sonore. Un acte courageux, face à un public aussi chaud que critique.
Puis, le véritable rituel commença. Les March Violets, figures mythiques d’un goth-rock viscéral, montèrent sur scène avec l’assurance de ceux qui ont défié le temps – et les modes – pendant plus de quarante ans. Dès les premières secondes, le ton fut donné.
Rosie Garland, souveraine noire et magnétique, n’avait pas besoin d’artifices pour captiver : vêtue avec élégance, elle imposait sa présence avec une voix tranchante, aussi envoûtante qu’une incantation. À ses côtés, Tom Ashton sculptait des sons bruts à la guitare, entre cris et dissonances maîtrisées, pendant que Mat Thorpe posait une basse grondante, menaçante avec désinvolture. Et toujours, ce fidèle compagnon : leur boîte à rythmes – peut-être encore le légendaire Dr. Rhythm – martelait son tempo mécanique, implacable et intemporel.
Le groupe ouvrit avec « Made Glorious », une entrée en matière majestueuse et crépusculaire, avant de plonger dans « Long Pig », un morceau viscéral aux allures de transe vaudou, à la fois dansant et inquiétant. Le public, entièrement vêtu de noir, était conquis. Chaque titre résonnait comme un écho du passé rendu furieusement présent.
Avec « Crow Baby », la nostalgie gothique reprenait ses droits. Rosie, prêtresse du dramatique et de l’élégance obscure, évoluait avec assurance, rappelant à chacun pourquoi cette chanson hante encore les dancefloors alternatifs. La communion avec le public était totale – une cérémonie noire célébrée dans la ferveur.
Les morceaux plus récents, tels que « Hammer the Last Nail » ou « This Way Out », prouvaient que les March Violets ne sont pas prisonniers de leur passé. Plus mélodiques, moins anguleux, ils conservent néanmoins la tension et l’âme du groupe. C’est une évolution, pas un compromis. Les paroles, toujours aussi mystérieuses, évoquaient des fragments de poésie sombre, presque cabalistique.
Avec « Grooving in Green », la salle atteignit l’extase. L’instant devint suspendu : les plus anciens revivaient leurs jeunes années, les plus jeunes comprenaient enfin pourquoi ce groupe est culte. Les guitares réverbérées, les rythmes m moment de renaissance collective.
Le set culmina avec « Heading for the Fire », morceau aussi incandescent que son titre le suggère. Un faux départ s’ensuivit, avant un rappel attendu, mais puissamment exécuté : « Fodder » relança la machine avant que « Snake Dance » – l’incontournable – ne vienne clore le rituel. On ne l’a pas simplement écouté : on l’a vécu, transpiré, crié.
À la sortie, les visages étaient rouges, les corps trempés, les esprits électrisés. Les March Violets, fidèles à leur héritage, n’ont rien perdu de leur éclat sombre. Ils ne cherchent ni à plaire ni à revivre le passé – ils l’incarnent, avec une intensité rare. Toujours dans l’ombre, mais désormais, en pleine lumière.
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