Jurassic Déception : Quand Gareth Edwards s'égare dans la jungle des blockbusters
- Abdoul Lamine Riche Ouattara
- il y a 3 jours
- 2 min de lecture
L’image est puissante, presque emblématique : deux personnages traversent un New York congestionné à bord d’un taxi, ignorant le cadavre monumental d’un diplodocus qui bloque la circulation. Cette scène, visuellement frappante, incarne malgré elle le malaise latent du film : une indifférence troublante, une banalité qui contraste violemment avec la majesté d’une créature disparue. Un symbole d’un film qui peine à trouver sa véritable identité.

Le dernier opus dirigé par Gareth Edwards pourtant cinéaste reconnu pour sa vision singulière (notamment avec Monsters ou Rogue One), ne parvient jamais à dépasser le cadre confortable et balisé du blockbuster générique, formaté et sans véritable souffle. Ce qui devait être un retour aux sources porté par l’écriture conjointe de Steven Spielberg et David Koepp devient rapidement un produit lisse, sans la tension ni l’intelligence qui avaient fait la force du film original de 1993.
Et pourtant, le potentiel était là. Le matériau d’origine – le roman dense et foisonnant de Michael Crichton – regorge de réflexions sur la science, la biodiversité, la géopolitique et les dérives technologiques. Un véritable thriller écologique doublé d’un roman d’aventure, que le cinéma n’a jamais totalement su (ou voulu) adapter dans sa complexité. Le résultat à l’écran, lui, reste prisonnier de son cahier des charges : rythme effréné, dialogues convenus, personnages peu développés et effets numériques omniprésents.
Gareth Edwards, réalisateur autodidacte et talentueux, avait su autrefois imposer une touche personnelle même dans des franchises lourdes comme Godzilla ou Star Wars. On espérait donc qu’il apporterait à cette nouvelle incursion dans l’univers des dinosaures une dimension plus introspective, une atmosphère contemplative à la hauteur de ses premières œuvres.
Mais ici, malgré quelques fulgurances visuelles, on assiste à une régression. Le film semble se contenter de recycler les frissons des parcs d’attractions, oubliant qu’un bon film de science-fiction – surtout lorsqu’il s’inspire d’une œuvre aussi riche – mérite davantage qu’une succession de poursuites et de rugissements.
La nostalgie ne suffit plus. Le public d’aujourd’hui mérite un récit ample, ambitieux, prêt à sortir des sentiers battus pour explorer les véritables enjeux soulevés par Crichton. Malheureusement, cette énième tentative se perd dans les brumes d’une franchise qui refuse de grandir, préférant rejouer sans fin la même partition, au lieu de composer un nouveau chef-d’œuvre.
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